Instantanés précis et percutants sur l’humain
Vendredi, 3 avril 2015
MISE à JOUR Vendredi, 3 avril 2015
Figure dominante de l’univers de la chanson francophone, Daniel Lavoie fait connaître son talent comme essayiste et poète dans un deuxième recueil fascinant, poétique et émouvant: Particulités.
S’il avait, dans Finutilité, offert des textes d’observation et de réflexion sur le monde, cette fois, il explore l’humain en utilisant comme angle d’approche le domaine des particules élémentaires.
«Le premier avait été fait pour le plaisir et pour présenter des chansons, sans penser écrire pour publier, puis je me suis fait prendre à mon jeu. Le deuxième, je l’ai fait plus sérieusement. Je me suis appliqué plus parce que j’avais vu la portée d’écrire un livre. Je pense qu’il est plus fini que le premier», observe Daniel Lavoie en entrevue, de sa maison de la région du Suroît.
Le poète est complètement fasciné par les particules élémentaires. «Je m’en suis servi comme point de départ, mais c’est une fascination extraordinaire. C’est la fondation de l’univers, de la vie, de l’humanité, de l’âme, de Dieu, de tout! Tout semble être fait de ça. Ce qui est extraordinaire, c’est qu’on a beau chercher, on a beau creuser, on ne trouve pas de réponse. Et c’est ce que j’aime, d’ailleurs. On trouve juste de plus en plus de particules et, chaque fois qu’on creuse un peu plus, on en trouve d’autres, et, moi, je trouve ça magique.»
Pour lui, c’est un «mystère tangible». «Quand on me parle de Dieu, je ne sais pas de quoi on me parle. Ça ne veut rien dire pour moi. C’est un concept qui a été inventé par du monde qui a besoin d’une solution à quelque chose. Mais, quand on me parle de particules, j’ai quelque chose, même si c’est très difficile de dire que c’est concret. À la limite, si Dieu existe, je le retrouve dans les particules.»
Recul et doutes
Il a été complètement absorbé par ce sujet. «J’ai fait beaucoup de textes et, petit à petit, j’ai vu qu’il y avait une ligne directrice qui en sortait. J’ai approfondi ça. J’ai travaillé. Je me suis rendu compte que ça pouvait devenir le modus vivendi d’un livre.»
Il souhaitait regarder le monde avec un recul sceptique et plein de doutes, pour voir les choses telles qu’elles sont et non comme on aimerait qu’elles soient ou «comment on s’arrange pour faire en sorte de croire qu’elles sont».
«C’est ce recul que je cherche vraiment dans tout ce que j’écris, sans a priori, sans règles de base.»
Essais poétiques
La poésie se retrouve dans chacun des textes. «Je ne considère pas ce livre comme un livre de poèmes. J’appelle ça des essais poétiques. C’est en prose et, même s’il y a un rythme et une rime, ça demeure quand même des essais. Peut-être qu’on pourrait appeler ça de la philosophie émotive?»
Il est d’accord: c’est très concentré. «Il y a deux ans et demi ou trois ans d’écriture, à un texte par jour. Après, tout ça est distillé. C’est un travail de moine. J’essaie de mettre un maximum dans le moins de mots possible. J’aime bien qu’une phrase puisse allumer toutes sortes d’idées et de réflexions.»
Il y a beaucoup de musicalité, de rythmique et d’émotion dans les textes. «Je passe beaucoup de temps pour que chaque phrase coule et en amène une autre, qu’il y ait non seulement une rythmique, mais souvent une rime à l’intérieur des phrases. J’ai toujours dit que c’étaient des textes qui étaient écrits pour être lus à voix haute.»
Marie-France Bornais
http://www.journaldemontreal.com/2015/04/03/instantanes-precis-et-percutants-sur-lhumain